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Alors que la pandémie se propage dans toutes les régions du globe, il semble que l’Afrique subsaharienne soit pour l’instant épargnée. Les taux remarquablement bas d’infection sont-ils dus à des facteurs socio-économiques spécifiques à cette région du globe  ?

D’après Mathias Altmann, épidémiologiste à l’École de santé publique de Bordeaux récemment interrogé en mars 2020 par un média français, il existe plusieurs hypothèses. Co-auteur d’une étude sur l’état de préparation et la vulnérabilité des Africains aux importations de COVID-19, il estimait qu’on ne peut expliciter pleinement ce phénomène.  L’une des hypothèses est la faible exposition de l’Afrique à la Chine comparé à l’Europe. Il y a en effet dix fois plus de voyages Europe-Chine que de voyages Afrique-Chine, ce qui pourrait expliquer, selon lui,  la lente introduction du virus sur le continent alors que l’épicentre de l’épidémie était en Chine.

Depuis, la situation a évolué avec la propagation mondiale du coronavirus, qui expose l’Afrique au virus à partir de l’Europe, ce qui est confirmé par le fait que les premiers cas enregistrés sur le continent africain ont été importés en majorité d’Italie et de France.

Une autre hypothèse, qui n’a pas encore été prouvée, avance l’existence supposée de nombreux cas non détectés, ce qui fait l’objet de nombreuses rumeurs. L’épidémiologiste fait cependant remarquer que si c’était le cas, il y aurait eu de nombreuses alertes dans les hôpitaux des capitales africaines et les unités de soins intensifs locales auraient enregistré un afflux massif de patients. Selon les informations à disposition, cela ne s’est pas produit, ce qui invalide l’existence de chaînes de transmission inconnues.

L’OMS a cependant tiré la sonnette d’alarme en faisant part de ses préoccupations concernant l’Afrique en cas de contamination massive. Dans un message très alarmiste, le patron de l’Organisation mondiale de la santé, l’Éthiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus, appelait le 18 mars l’Afrique à « se réveiller » face à la menace du nouveau coronavirus, soulignant que le continent devait se préparer « au pire, dès aujourd’hui  » alors que le COVID 19 commence à se propager localement, car les systèmes de santé, en particulier dans les pays où la pauvreté est omniprésente, sont faibles. « L’Afrique devrait se réveiller, a-t-il lancé, mon continent devrait se réveiller »

La crise d’Ebola a déclenché une prise de conscience

L’Afrique noire est-elle prête à affronter la pandémie?

Mathias Altmann reste positif sur ce sujet, rappelant qu’il y a déjà un niveau de préparation sur ce continent, qui a eu sa part d’épidémies, entraînant une énorme quantité de connaissances sur le terrain, notamment en Afrique de l’Ouest. La crise d’Ebola a déclenché une prise de conscience, forçant les autorités locales à adopter des systèmes de coordination valables pour toute urgence sanitaire.

Plans stratégiques

En dépit de ce que peut en dire Tedros Adhanom Ghebreyesus, plusieurs pays se sont dotés dès le mois de janvier de plans stratégiques pour faire face au coronavirus et renforcer la sécurité sanitaire à leurs frontières alors que des gouvernements, dont ceux du Kenya et du Rwanda, ont récemment décidé de suspendre jusqu’à nouvel ordre les rassemblements ou événements internationaux par mesure de précaution.

Des quarantaines systématiques sont imposées aux voyageurs en provenance de pays touchés par l’épidémie par plusieurs États, dont le Burundi ou l’Ouganda, tandis que de nombreuses compagnies aériennes africaines, dont Royal Air Maroc, RwandAir ou encore Kenya Airways, ont suspendu les liaisons avec plusieurs pays considérés à risque comme la Chine ou l’Italie. Plaçant la barre un cran au-dessus, le ministère du Tourisme et des Transports aériens sénégalais annonçait le 19 mars la fermeture totale de l’espace aérien sénégalais à compter du lendemain jusqu’au 17 avril, fermeture qui a été prolongée jusqu’au 31 mai 2020.