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Tidjane Thiam a crevé le plafond de verre en atteignant le plus haut sommet du monde très élitiste de la finance. Retour sur le parcours de l’ancien directeur du numéro deux bancaire helvétique

Le départ en février 2020 de l’ancien PDG de Crédit Suisse, Tidjane Thiam a pris le monde de la finance par surprise. En dépit d’un bénéfice de 3,42 milliards de francs en 2019, une hausse de 69% sur un an, le numéro deux bancaire helvétique se sépare de son Directeur général, pourtant nommé banquier de l’année 2018 par le magazine britannique Euromoney. Nomination à la suite de laquelle il s’était alors dit content d’avoir «purement et simplement sauvé la deuxième banque suisse», seulement trois ans après avoir été investi sur la Paradeplatz, siège historique du Credit Suisse.

Commentant son départ imprévu, le surdoué de la finance s’est confié à un quotidien français  : « Le Credit Suisse, c’est ma fin de carrière de PDG. Je suis dans ma dixième année de PDG et je ne pense pas l’être une troisième fois  ! » Il laissera toutefois Credit Suisse avec des bénéfices au plus haut depuis 2010.

La fâcheuse question de la surveillance illicite de l’ancien dauphin de Tijiane Thiam, Iqbal Khan, qui évolue aujourd’hui chez UBS entraînera le scandale qui le poussera à démissionner. « J’ai convenu avec le conseil d’administration que je quitterai la banque [..] Il ne fait aucun doute que cela a nui au Credit Suisse et a conduit à l’incertitude et à la souffrance », a lancé Tijdane Thiam dans un communiqué de presse.

Il s’était alors dit content d’avoir « purement et simplement sauvé la deuxième banque suisse »

Un début d’année difficile
Un mois avant ce scandale, Crédit Suisse avait été pris dans un imbroglio avec l’ambassadeur de la banque, Roger Federer, qui est également l’ami de Tijiane Thiam.

Tout avait commencé avec les tweets de Greta Thunberg, la star de l’écologie suédoise, #RogerForClimate et #WakeUpRoger, qui ont fait le tour de la Toile, suppliant Roger Federer de demander à son sponsor Crédit Suisse de sortir des énergies fossiles, suivi de la curieuse histoire des activistes du climat qui ont investi les locaux d’une succursale de l’établissement bancaire à Lausanne, pour y jouer une partie de « tennis » sauvage. Cette intrusion avait pour but de dénoncer les émissions de gaz à effet de serre générées par les investissements de Crédit Suisse.

Lors du procès au Tribunal de Renens le 13 janvier, à la surprise générale, les jeunes militants condamnés pour ces actes avaient tous été acquittés. Grâce à sa notoriété, Federer a dû réagir en promettant de dialoguer « sur ces questions importantes avec ses sponsors ». De même, le patron de Credit Suisse avait confirmé à son tour « sa volonté de ne plus accorder de prêt à des projets de centrales thermiques. »

Quoi qu’il en soit, Tijiane Thiam aura marqué l’histoire de la finance helvétique. Osons le dire, la Suisse lui doit beaucoup pour avoir redressé un de ses piliers bancaires. Ce ne seront pas les actionnaires de Crédit Suisse qui diront le contraire.

UNE HISTOIRE ET DES FAITS INSOLITES POUR UN BANQUIER HORS NORME

Sa mère, Mariétou Sow, est la nièce de Félix Houphouët-Boigny, fondateur et premier Président de la Côte d’Ivoire. Son père sénégalais, Amadou Thiam, a été Ministre de l’information au sein du gouvernement ivoirien. Il est le neveu de Habib Thiam, ancien premier ministre du Sénégal et ex-champion de France du 200 m dans les années 1950.

Petit dernier d’une fratrie de sept enfants élevés à Abidjan, en Côte d’Ivoire, il s’envole vers la résidence de Félix Houphouët-Boigny à Genève, à la demande de ce dernier. Il est alors âgé de 6 ans et illettré. Il rattrapera son retard de manière époustouflante. Démonstration en six faits peu communs:

• Premier au concours général de mathématiques en 1980

• Major de l’École des mines, prestigieuse grande école française

• Major à Polytechnique, il a défilé sur les Champs Elysées le 14 juillet 1983 en grande tenue en tête de sa promotion (X81), comme le veut la tradition

• En prenant la tête de Prudential en 2009, il est le premier Noir à diriger une multinationale du FTSE 100. Quand il quitte l’assureur britannique, celui-ci a dégagé un bénéfice net de 2,8 milliards d’euros, contre une perte de 300 millions d’euros au premier semestre 2009, juste avant son arrivée

• Avec son arrivée à la tête de Credit Suisse, il est le premier Africain à diriger une institution financière de cette taille

• Suite à son départ de Crédit Suisse, beaucoup se prennent à rêver qu’il pourrait être le prochain Président de Côte d’Ivoire.