Par fortes chaleurs, le risque pour les jeunes oiseaux de tomber du nid en fuyant la fournaise des sous-toits est accru. Nombreux sont les citoyens qui ont dernièrement contacté le Centre ornithologique de Genève (COG) pour leur venir en aide. La police vient...
Un imposant château, niché sur les hauteurs de Montreux, dans le village de Caux. En soi, rien de très particulier. Si ce n’est son histoire, inscrite dans la longue relation qu’entretient la Suisse avec la diplomatie internationale. Petit focus sur ce lieu hors du commun.
Inauguré en 1904 en tant qu’hôtel, ce palace doté d’une vue imprenable sur le Léman et les Alpes se retrouve à l’abandon durant l’après-guerre, les deux conflits mondiaux successifs s’étant avéré catastrophiques pour le secteur de l’hôtellerie. Mais en 1946, le Réarmement moral (aujourd’hui devenu la fondation Initiatives & Changements), mouvement international en faveur de la paix, rachète le château. Acquisition qui se fait grâce aux dons de près d’une centaine de familles suisses membres dudit Réarmement moral.
Aux origines du Réarmement moral
Derrière ce nom, qui peut sembler à la fois belliqueux et vertueux, se cache le pasteur luthérien américain d’origine suisse Frank Buchman (1878 – 1961). Dans le contexte politiquement chargé des années 30, où l’on assiste à la montée des extrêmes, il fonde, avec un cercle de proches, le groupe d’Oxford, dont le but initial était de susciter un engagement chrétien auprès de personnages influents lors de réceptions privées.
Convaincu que les plus grands dangers auxquels l’humanité faisaient face étaient à la fois le communisme athée, le nazisme et les vices du capitalisme, Buchman et ses disciples lancent un appel à un « réarmement moral et spirituel ». C’est ainsi que Buchman lance le mouvement en 1938. Lequel suscitera des adhésions surtout parmi les libéraux de droite et les conservateurs.
De 1942 à 1971, le Réarmement moral a pour quartier général l’île Mackinac, située sur le lac Huron, dans l’état américain du Michigan. Mais dès 1946, avec le rachat du Caux Palace, c’est un autre lac qui se voit servir de décor aux rencontres de Buchman et ses amis: le Léman.
Le rôle de Caux dans la réconciliation franco-allemande
Dès lors, les rencontres diplomatiques ont pour coulisses la Riviera vaudoise. Entre 1946 et 1950, une série de réunions entre responsables allemands et français contribue à la réconciliation des deux anciens ennemis. Le rôle joué par Buchman dans cette issue est d’ailleurs clé, puisque c’est grâce aux rencontres de Caux que le pasteur réussit à créer un lien de confiance entre le chancelier allemand Konrad Adenauer et Robert Schuman, alors Ministre Français des Affaires Étrangères.
Cette réconciliation entre deux ennemis historiques culmine en 1952 avec la création de la Communauté européenne du charbon et de l’acier, précurseur de la communauté européenne. Mais les dialogues de Caux en faveur de la réconciliation après-guerre ne se limitent pas au couple franco-allemand. Ainsi, en 1950, Buchman accueille la première délégation diplomatique japonaise à voyager après le conflit mondial. Elle inclut des parlementaires, les maires d’Hiroshima et Nagasaki et des dirigeants économiques. Elle fait escale à Caux avant d’embarquer pour une visite officielle aux États-Unis.
En plus d’œuvrer à la réconciliation entre les anciens belligérants, Frank Buchman et son mouvement facilitent aussi des médiations dans le cadre de la décolonisation de certains pays africains. Le Réarmement moral a ainsi joué un rôle dans la décolonisation pacifique au Maroc et en Tunisie. Dans le contexte de la guerre froide, Buchman prêche en faveur des valeurs chrétiennes auprès des nouvelles élites des pays du tiers-monde, pour contrer l’expansion du communisme.
La transformation
C’est aussi au Caux Palace que se rencontrent entre 1968 et 1969 des délégations venues du Sud-Tyrol italien, région germanophone en proie à une quasi-guerre civile ethnolinguistique avec Rome.
Mais le Réarmement moral va se transformer. En effet, le mouvement connaît un déclin dans les années 70, et avec la fin de la guerre froide, se retrouve privé d’une partie de sa raison d’être. Pour assurer la pérennité de l’héritage du pasteur Buchman, il faut un renouveau et c’est une personnalité de la diplomatie suisse et de la Genève internationale qui va s’en charger: Cornelio Sommaruga.
Celui qui fut notamment Secrétaire d’État aux affaires économiques extérieures entre 1984 et 1987 et Président du Comité international de la Croix-Rouge de 1987 à 1999 sera d’abord en charge de la branche suisse du Réarmement moral, qui organise les Rencontres de Caux, avant de présider aux destinées de la maison-mère de 2002 à 2004. A son instigation, le mouvement change de nom en 2001, pour devenir la fondation Initiatives et changements. Rebranding qui a pour objectif de tourner la page de l’orientation politique anticommuniste des décennies précédentes, tout en gardant « l’esprit de Caux » prôné par Buchman.
LE CAUX FORUM, UN RENDEZ-VOUS ANNUEL
L’année 2021 est particulière pour Caux : elle marque les 75 ans de la présence d’Initiatives et Changement sur les hauts de Montreux, et a vu un retour partiel en présentiel du forum avec un format hybride, après une édition 2020 entièrement en ligne.
En outre, le Caux Palace a également accueilli le Sommet mondial sur la négociation humanitaire sur les lignes de front entre le 28 juin et le 3 juillet. Financé par le DFAE et organisé par le Centre de compétences en négociation humanitaire (CCHN), il s’agit d’une initiative conjointe du CICR, du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, du Programme Alimentaire Mondial (PAM) et de la branche suisse de Médecins Sans Frontières, notamment.