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À 21 ans, Serhat Açig a lancé sa première start-up dans un milieu peu prisé des jeunes: le pressing à sec. Pourtant, EGEN, qui signifie « propre à soi » en romanche, emploie la technique de l’aquanettoyage ou le « wet cleaning » à 100%, un traitement numérique et écologique.
Serhat Açig est un patron engagé qui a créé en 2016 EGEN, le premier pressing écologique de Suisse. Contrairement aux concurrents utilisant encore du perchloroéthylène (PER), un produit toxique, l’entrepreneur milite pour un nettoyage écologique des textiles sans solvant. La start-up a séduit une clientèle prestigieuse, notamment les grands horlogers, les écoles hôtelières, dont celle de Lausanne, et les blanchisseries industrielles qui sous-traitent des textiles spéciaux. Lors d’une interview par visioconférence, crise sanitaire oblige, Serhat Açig nous dévoile le secret de son succès.
Serhat Açig, comment vous définissez-vous en quelques mots ?
Je suis quelqu’un d’extrêmement optimiste, un assoiffé de connaissances, curieux, et prêt à mettre tout en œuvre pour atteindre les objectifs qu’il s’est fixés. Lorsque j’ai quitté la Turquie à pied pour traverser l’Europe et rejoindre mes parents et ma petite sœur dans un camp de réfugiés près d’Yverdon-les-Bains (VD), je n’avais que 9 ans. Je suis un survivant et un combattant. En ce qui concerne le risque entrepreneurial, cela m’a servi de leçon. Si je n’avais pas pris ce risque, je ne serais pas là aujourd’hui. Tout ce que j’ai vécu pendant mon enfance, je ne le prends pas comme un handicap, mais plutôt comme la plus grande chance de ma vie.
Expliquez-nous le concept de l’aquanettoyage.
Le nettoyage à sec des vêtements se décline en plusieurs systèmes. Il y a les pressings qui utilisent du PER, un solvant cancérogène, et très volatil. La deuxième technique utilise le KWL, un nouveau solvant, moins dangereux que le PER. Il n’est pas volatil, mais il reste toutefois un solvant, donc extrêmement explosif. En ce qui concerne l’aquanettoyage ou wet cleaning, il s’agit d’un procédé très prisé en France, recourant à l’eau et aux agents nettoyants biodégradables. Nous avons apporté des améliorations au système existant qui permet de traiter des tissus délicats, par exemple la soie, le cachemire ou la laine vierge. En addition, nous avons mis au point un logiciel de programmation conçu pour les machines à laver de dernière génération, et nous avons terminé la configuration d’une machine sur laquelle nous allons poser un brevet qui nous permettra de l’utiliser dans les ménages. Dès le départ, le but d’EGEN était de baisser considérablement la consommation en eau. Dorénavant, nous consommons 80% d’eau en moins que les procédures de wet cleaning actuellement disponibles sur le marché.
Comment a germé l’idée de vous lancer dans le pressing écologique ?
Un jour, alors que j’étais encore un adolescent, ma mère m’a demandé de ramener la lessive chez un retraité. La satisfaction qu’il a exprimée en retour du service rendu a déclenché un premier déclic chez moi. J’ai alors décidé de créer Washup, à la fois une plateforme web et une application, qui permet d’organiser le retrait et la livraison de vêtements à domicile dans le but de connaître l’éventuel intérêt pour ce genre de service en ligne. À cette époque, j’étais apprenti programmeur en informatique, secteur alors en manque d’employés. Par conséquent, j’ai convaincu les copines de ma mère de traiter les commandes.
Plus tard, lors d’un stage dans une start-up, j’ai eu mon deuxième déclic. L’ambiance au sein de l’entreprise était tellement super que j’ai attrapé le virus d’entreprendre. La volonté de construire une entreprise à partir de zéro, de créer une marque et de conquérir le monde est venue de cette expérience. C’est la raison pour laquelle j’ai arrêté ma formation et entamé un deuxième CFC d’employé de commerce en gestion d’entreprise. À trois mois de mes examens finaux, j’ai eu l’occasion d’acquérir un pressing à Yverdon-les-Bains. Je n’en avais pas les moyens, mais grâce à mes économies et au soutien de mes parents, j’ai pu faire cet achat et signer le contrat de bail à loyer.
Pourquoi cet intérêt pour un univers si peu prisé des jeunes ?
Pour attirer de la clientèle jeune, il faut rendre nouveau et attractif ce qui pouvait paraître vieux. C’est logique de faire sans solvant, de consommer moins d’eau, d’être moins énergivore, et plus respectueux de la santé et de l’environnement. Nous, la génération Y, nous sommes capables d’y arriver. Le marché devient intéressant et notre modèle séduit. Les jeunes commencent à s’investir dans les franchises EGEN et cela me fait plaisir puisqu’ils m’appellent de leur propre initiative. À ce propos, mis à part le franchisé de Delémont, un père de famille, tous les autres ont moins de 30 ans. Nous allons ouvrir trois franchises simultanément en mars prochain. Ce qui porte à six le nombre total de nos magasins. Celui qui s’ouvre à Neuchâtel sera exploitée par un jeune de 28 ans. Quant au franchisé de Saint-Prex (VD), il a 20 ans, et celui de Bienne (BE) a moins de 30 ans.
Quel a été l’impact de la crise sanitaire sur EGEN ?
Pour notre part, l’impact a été plutôt positif, même si nous avons subi une baisse de chiffre d’affaires, nous n’avons pas fermé. Une des choses que j’ai apprises grâce à EGEN, c’est la patience. De ce fait, nous avons profité de la période du semi-confinement pour préparer et planifier le lancement des nouvelles franchises et de trouver des locaux. Pendant ce temps, beaucoup de pressings ont souffert et ont dû fermer, surtout ceux qui dépendent uniquement de la clientèle privée.
Parlez-nous de vos autres projets.
Depuis deux ans maintenant, nous sommes actifs dans des programmes de recyclage de vêtements. L’année passée, nous avons récupéré 25 tonnes au total, dont en grande partie des vêtements presque neufs de l’École hôtelière de Lausanne. Nous avons envoyé 20 tonnes d’habits sur les îles grecques dans des camps de réfugiés en Grèce, avec l’aide de l’UNHCR. Cela nous a permis d’habiller des milliers de personnes. Dans un tout autre registre, en 2018, j’ai créé une deuxième start-up avec deux amis: Willka. Le financement se fait à 100% grâce aux bénéfices d’EGEN. En tant que fan d’espace, un selfie posté sur les réseaux sociaux en 2015 par l’astronaute Scott Kelly avec une laitue spatiale m’a intrigué. Conscient du potentiel de faire pousser les plantes en tous lieux, j’ai fait des recherches pour comprendre ce procédé. Dès lors, Willka conçoit des systèmes qui permettent de cultiver les fruits et légumes en aéroponie, sans terre ni soleil, et de manière verticale. Les avancées technologiques, et techniques, que nous sommes en train d’élaborer nous permettront un jour, peut-être, de collaborer avec l’agence spatiale européenne, ou avec la NASA. Par une heureuse coïncidence, Kimbal Musk, frère d’Elon (le patron de Tesla), dont je suis le plus grand fan, est le cofondateur d’une start-up new-yorkaise active dans le vertical farming. Pour la petite histoire, Kimbal a entendu parler de Willka en 2018 lors de la conférence de Davos. Je vous laisse imaginer ma réaction lorsque j’ai reçu une vidéo avec un message de félicitations de sa part sur mon compte Instagram.