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Tous les trois ans, le Prix Lignum récompense les meilleures prestations
en bois, du meuble aux ensembles résidentiels en passant par les aménagements intérieurs. Faire connaître un travail du bois orienté vers l’avenir, tel est l’objectif du concours, décerné à l’échelle nationale pour la cinquième fois depuis 2009. Voici les trois premiers prix 2021 pour la région ouest, qui reflètent particulièrement la tendance actuelle à la durabilité.

Les projets lauréats de la Région ouest illustrent parfaitement la diversité de mise en oeuvre du bois : Le centre d’hébergement collectif de Rigot à Genève (1er Prix) fait l’éloge du tout bois qui a été utilisé jusqu’aux fondations. Le complexe scolaire de l’écoquartier des Vergers à Meyrin (2e Prix) élargit le champ des possibles entre le bois et le béton. La surélévation exemplaire à Vevey (3e Prix et Bronze national) fait quant à elle office de jalon pour tout un quartier. Cinq autres projets ont également été récompensés par une mention.

1. Le Centre d’hébergement pour réfugiés de Rigot, à Genève, se situe à proximité de la place des Nations, non loin du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et du Palais des Nations (Photo ci-dessus ©Charpente Concept)

Le choix du site est un geste politique fort qui réaffirme la tradition genevoise de l’accueil. Le complexe se compose de deux barres de cinq niveaux pouvant accueillir 370 réfugiés. Les bâtiments sont implantés avec précision, tant du point de vue topographique qu’urbanistique. Ils rachètent la légère déclivité du terrain et délimitent une cour intérieure. Une succession de terrasses fait tampon par rapport à la route agrémentée de platesbandes que les résidents cultivent avec les riverains. À l’autre extrémité, la cour débouche sur le parc Rigot, qui n’est séparée par aucune clôture.

Le centre est une réalisation provisoire, conçue pour dix ans. Les architectes ont opté pour une construction modulaire et une stratégie zéro béton. Les deux barres sont entièrement réalisées en bois, depuis les fondations – des pieux battus en mélèze – jusqu’à la toiture. Ainsi la Ville pourra-t-elle, dans dix ans, restituer le terrain au parc et réinstaller les modules à un autre endroit. Tous les éléments pourront être réutilisés. Le projet constitue un exemple remarquable de gestion durable de l’espace urbain et du matériau bois. La construction, composée d’éléments modulaires préfabriqués, est très économique. Le système permet d’aménager des logements pouvant accueillir entre deux et huit personnes. Les modules rythment les façades selonune ordonnance très rigoureuse, tandis que la cour centrale est animée par les coursives desservant les logements. Le projet exploite de façon optimale les avantages de la construction bois industrielle, grâce à laquelle résulte une plus-value architecturale tout à fait remarquable pour ce type de programme. Le choix radical de recourir intégralement au bois a d’ores et déjà rencontré de l’écho par-delà la frontière nationale.

2. Les équipements publics de l’Écoquartier les Vergers, à Meyrin.

©Julie Masson

Situé sur les confins de la ville et de la campagne, le complexe scolaire des Vergers, à Meyrin, se compose de quatre grands bâtiments pavillonnaires délimitant plusieurs cours ouvertes sur le site. Par rapport à l’idée que l’on se fait en général de la construction bois, on est d’abord déconcerté, en découvrant le nouvel ensemble, par l’apparente prédominance du béton mis en oeuvre sous la forme de coursives périphériques et de vastes avant-toits qui relèguent les façades en bois et verre à l’arrière-plan. Les architectes ont renversé la logique habituelle en réalisant d’abord l’exosquelette et les gaines d’ascenseurs en béton, puis la structure et les aménagements intérieurs en bois. Du point de vue constructif, les deux s’imbriquent à merveille, les raccords étant très proprement résolus et parfaitement exécutés. À l’intérieur, c’est l’épicéa clair des parois et planchers qui domine.

Les planchers mixtes bois-béton, revêtus de terrazzo, assurent l’isolation phonique requise et servent de masse thermique. Les coursives, qui peuvent être utilisées comme voies d’évacuation, protègent assez efficacement les façades du soleil pour rendre des stores superflus. Les avant-toits en béton garantissent par ailleurs une excellente protection contre les intempéries, aucune autre mesure de préservation du bois n’ayant ainsi dû être prise.

Les rez-de-chaussée abritent les fonctions publiques telles que restaurant, aula et salle de sport. Au-dessus se trouvent les salles de classe, entre lesquelles sont ménagés de généreux dégagements. La construction scolaire est un domaine d’application privilégié pour la construction bois. L’ensemble de Meyrin élargit le champ des possibles. Il convainc tant par son implantation que par son organisation en plan et par l’ambiance des locaux. Quant à sa construction hybride, qui renverse le rapport usuel entre bois et béton, elle ouvre une voie des plus prometteuses.

3. Bronze national : Surélévation, Vevey

©Joël Tettamanti


La surélévation de cette ancienne maison d’artisans veveysanne donne l’impression d’avoir toujours existé. Mieux : elle confère au bâtiment encore plus de valeur qu’il n’en avait. À partir de l’existant, les architectes ont développé un vocabulaire qui leur a permis d’en poursuivre l’histoire. Le projet s’est par ailleurs enrichi de thèmes fournis par le contexte urbain. De fait, la surélévation n’accroît pas seulement la densité du quartier en termes de volume construit, mais aussi de culture du bâti.

Il en va de même à l’intérieur, où les architectes réinterprètent, dans la surélévation, le motif de la galerie-jardin d’hiver. Le grand espace ouvert est ici subdivisé en différentes zones par les éléments porteurs de la construction bois. L’exécution est soignée et chaque détail mûrement étudié. En s’inspirant du vieux motif de la charpente, les architectes déclinent un langage architectural singulier, dont la richesse fait plus que compenser le peu de place à disposition. La stratégie adoptée est susceptible d’être appliquée à de nombreuses surélévations en Suisse. Elle illustre les avantages du bois pour ce type d’interventions, auxquelles le matériau se prête idéalement. Elle montre que la densification peut être un gain tant pour les propriétaires et les habitants que pour le quartier tout entier. Enfin, construction bois et construction massive se conjuguent ici comme si toutes deux avaient toujours été indissociables.